dimanche 8 février 2009

Rien de grave , Justine Lévy


Rien de grave est l’histoire de Justine Lévy mais dans le livre elle s‘appelle Louise. Justine a travesti le nom de ses personnages car elle est la fille de Bernard-Henri Lévy. Un moyen de contourner les médias ou une ruse pour attirer les projecteurs ?

Certains diront de cette autobiographie qu’elle est un simple règlement de comptes entre people, une affaire médiatique et sans intérêt. En surface peut-être. Mais si l’on détache du livre toute connotation médiatique il prend alors une toute autre ampleur.

Un livre vrai, dans lequel l’auteur se livre parfois de manière impudique mais juste, sur la rupture, l’impression de néant dans laquelle la dépression peut plonger une personne, ou encore la dépendance aux amphétamines. Rien de grave prend alors l’aspect d’un récit thérapeutique, une échappatoire, une porte ouverte vers la rémission. L’auteur emploie un style courant si ce n’est familier, semblable en tous points au langage parlé ce qui embarque le lecteur dans une atmosphère de proximité et de confidences.
En 2004 Justine Lévy décrochera le Prix Littéraire Le Vaudeville ainsi que le Grand Prix Littéraire de l’Héroïne Marie France pour ce livre.

L’ouverture se fait sur l’enterrement de sa grand-mère. Grand-mère chérie, adorée, qui l’aura élevée plus que son père et sa mère, grand-mère pourtant qu’elle ne pleure pas. « Ma grand-mère est morte, mais je suis si tuméfiée à l’intérieur, désespérée, détruite, que je ne suis pas triste, et je ne pleure pas.».

Louise est une fille meurtrie par une histoire d’amour qui aura mal terminée. Le chagrin l’a anesthésiée, elle a perdu les larmes, la douleur, comme d’autres perdent la vue ou la parole. Être quitté par son mari pour la maîtresse de son beau-père, c’est vrai que ce n’est pas facile. Entendre son ex-mari lui dire qu’il va avoir un enfant avec sa nouvelle femme, un an après l’avoir fait avorter elle à 5 mois de grossesse, il est vrai qu’il y a de quoi se sentir mal. « Cet homme qui n’a pas voulu de l’enfant qu’ensemble on avait fait. Ce n’est pas celui là qu’il voulait. C’est pas avec moi qu’il le voulait. Cet enfant il n’en voulait pas, on l’a fait ensemble et ensemble on l’a tué, tout ce qu’on a fait ensemble est mort. » Voir sa grand-mère emportée par un cancer, complimenter sa mère sur ses cheveux et apprendre qu’il s’agit d’une perruque qu’elle aussi a un cancer, qu’elle est en phase trois mais qu’elle va se battre. Se prendre tout ça dans la figure, dans une période de temps restreinte, ça fait quand même beaucoup pour une seule personne.

Entre les amphétamines, les tranquillisants, et les antidépresseurs, se droguant pour être à la hauteur de ce qu'attend d'elle son mari Adrien lorsque, poursuivant son ambition surdimensionnée, il va de soirées en manifestations mondaines et politiques.
Tout faire pour plaire, pour être à la hauteur, sans que personne ne voit rien, en se détruisant à petit feu, mais sans un mot, sans en avoir conscience, du moment que cela garde Adrien, tout va bien. « J’avais mes douze gélules par jour et je pouvais me dire: ça y est je ressemble à celle que cherche Adrien, cet être implacable qui répond du tac au tac, l’esprit toujours incandescent »
Et puis au final les amphétamines ne font plus effet, elles ne donnent plus le change et deviennent obligatoire pour exécuter ces petits gestes du quotidien que l’on fait normalement sans réfléchir.

Alors c’est la cure de désintoxication, Adrien est présent au départ mais finit pas se faire de plus en plus rare, il est lointain, absorbé par son travail, quelque chose entre eux s’est défait. Un soir il annonce à Louise qu’il a besoin de lui parler, eux qui se moquaient toujours de ceux qui disait « il faut qu’on parle ».
Alors qu’elle avait arrêté les amphets depuis 1 an, qu’elle se sentait de nouveau forte, qu’elle n’avait plus peur qu’il la quitte ça y est c’était leur tour. Louise comprend très vite à son menton qui tremble, à cet air qu’elle ne lui connaît pas, que cette fois-ci l’amour ne pourrait pas réparer ce qui s’était cassé. « J’ai pas pleuré le jour où il m’a quitté. J’en mourais d’envie, j’étais pleine de larmes à l’intérieur, noyée de larmes à l’intérieur, à l’intérieur je hurlais, mais devant lui j’ai pas pleuré.»

Louise finit par rencontrer Pablo, cet homme qui l’aimera sans rien attendre d’elle, cet homme qui acceptera ses blessures, son mauvais caractère. Elle le laissera entrer dans sa vie, occuper son appartement devenu trop grand pour elle. Il l’ouvrira de nouveau au monde et à l’envie de vivre. Il pansera ses blessures et l’aidera à redevenir celle qu’elle était.
« La vie est un brouillon, finalement. Chaque histoire est le brouillon de la prochaine, on rature, et quand c’est à peu près propre et sans coquille c’est fini, on n’a plus qu’à partir, c’est pour ça que la vie est longue. Rien de grave. »


Le rôle de la société:
Être la fille d’un intellectuel et d’un top model, être baigné dans un monde où les parents sont absorbés par leur travail, par l’image qu’ils renvoient, ce n’est pas un quotidien évident, surtout pour une enfant. Justine a donc vécu dans un monde où tout semble aller pour le mieux, évidemment ses parents ont de l’argent, papa est là dès qu’il y a le moindre petit problème, oui aujourd’hui ils sont là mais ça n’a pas toujours été le cas. Certains disent que seule la célébrité de son père a permis à Justine d’être publiée. Un coup de pouce de papa n’a peut-être pas été négligeable mais c’est Justine qui a pris sa plume et qui nous a conté à cœur ouvert sa descente aux enfers puis sa renaissance.


Ce que j’en retiens c’est que le bonheur peut cesser à tout instant, qu’il ne faut pas compter sur les autres pour nous rendre heureux, mais seulement sur soi même. Un livre qui nous fait relativiser, on oublie nos petits bobos de cœur le temps de la lecture, on se dit qu’il y a pire que nous et qu’au final ce n’est rien de grave.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire